Peut-on oublier Vargas ? Faire abstraction de son style, de son humour, de son ambiance ? Essayons, pour voir, de faire comme si le scénario était tout neuf, et Adamsberg un personnage inventé par Régis Wargnier et ses scénaristes.
José Garcia compose un flic plutôt tranquille, sans pistolet ni vulgarité, à l’écoute de ses intuitions et surtout de ceux qu’il rencontre, comme le vieil érudit (Serrault, pas mal), l’éternel étudiant un peu bourru (Mathias Mekluz , pas mal aussi), l’annonceur public plutôt original (Gourmet, mieux que pas mal).
L’enquête qu’il mène est étonnante, avec pour décor de vieilles peurs faisant penser à d’autres plus récentes, on croit qu’on va basculer dans un polar d’anticipation… Mais il y a aussi ces deux filles dont on se passerait bien, parce qu’elles n’apportent rien au récit, un amour passé qui taraude notre commissaire, et une petite jeune dont on se demande comment elle se retrouve dans les bras du quadragénaire. Et puis la fin arrive, des explications fumeuses avec de ridicules flash-back africains et ce n’était donc que cela, tout ça pour ça… Le soufflé retombe (s’il a gonflé, ce qui n’est pas tout à fait sûr).
Alors on repense à Vargas, aux quelques changements de l’intrigue (importants, pas importants ? en fait on s’en balance), à tous les personnages secondaires qui font l’ambiance, ici totalement absente. Aucune mélancolie souterraine, pas de poésie de l’absurde, rien qu’un polar un peu moins banal que l’ordinaire. Tout le contraire du livre, donc. Replongez-vous dans votre bibliothèque, ou bien filez chez le libraire, mais pour le film, vous pourrez vous contenter d’y jeter un œil dans deux ans sur TF1, pour comparer. On ne peut pas oublier Vargas.