L'affiche est révélatrice de ce film étonnant : visage diaphane de Kirsten Dunst, en personnage historique classique, barré d'un titre rose pétant, volontairement anachronique.
Il ne faut pas s'attendre à une biographie fidèle de la reine mal-aimée des Français, parce qu'autrichienne, parce que tardant à donner une descendance au roi, parce qu'ignorant la misère du peuple et dépensant sans compter.
C'est le portrait d'une jeune fille parachutée dans un monde étrange et ridicule, loin de sa famille, découvrant les perversités d'un milieu incroyablement sérieux et futile à la fois. Il n'y a pourtant pas de regard apitoyé sur le destin de cette jeune reine se retrouvant au mauvais endroit au mauvais moment, mais parvenant tout de même à se créer des espaces de liberté.
C'est parfois d'une précision décorative historique assez stupéfiante, et à d'autres moments complètement décalé de l'idée qu'on peut avoir des personnages et de l'époque, décalage créé par la musique, la gestuelle, les mimiques, la langue employée (l'anglais !). Mais ce qui reste au bout du compte, ce sont tous ces petits instants magiques sans paroles, d'une grande poésie, délibérément démythifiant.
Sofia Coppola filme comme personne l'adaptation -ou le rejet- d'un personnage dans un milieu qui lui est étranger. Après Scarlett Johansson et Bill Murray au Japon (Lost in translation), voici donc Kirsten Dunst dans le Versailles du 18ème siècle. Elle y fait merveille, et à l'image des desserts de la cour, elle y est parfois pâtisserie glacée, poudrée, hautaine et superficielle, mais plus souvent fraise juteuse, délicate et naturelle, croqueuse de vie et finalement croquée.