La femme enfant
 
Un mercredi comme un autre, entre deux séances au MK2 bibliothèque, je traîne dans la boutique DVD. Et là, dernier d’une pile que je pressens n’avoir jamais été très haute, un film accroche mon regard. Son affiche fut longtemps accrochée sur les murs de ma chambre d’adolescent. Une jeune fille au regard de chat, mi douceur, mi braise, surmontée du titre, la femme enfant.  Sorti en 1980, il n’était pas resté bien longtemps sur les écrans, mais le gérant du ciné de la ville où j’habitais, l’Excelsior, l’avait aimé et l’avait programmé quelques semaines. Maintenant, ce serait inimaginable.
C’est une femme qui l’avait réalisé, Raphaële Billetdoux, plus connue pour ses livres que pour cet unique film. Huit ans plus tard, Zulawski avait adapté au cinéma son roman le plus connu, “Mes nuits sont plus belles que vos jours”.
La femme enfant racontait l’histoire d’une enfant de douze ans qui se lie avec un homme renfermé et simple d’esprit, joué par Klaus Kinski. C’était une étrange histoire de tendresse partagée qui frôlait les limites de l'innommable, sans jamais les dépasser. Mystérieuse, secrète, dramatique... Tout pour plaire à un ado romantique et plus ou moins bien dans sa peau, comme beaucoup d’autres de son âge.
Dans la petite salle de l’Excelsior, je l’avais vu deux fois, et conseillé à tous ceux que je pouvais, sans jamais vraiment rencontrer un enthousiasme égal au mien...
Quelques années plus tard, il avait été programmé à la cinémathèque de Beaubourg, en séance unique, et bien sûr j’y étais allé, avec mon ami Thierry D. (s’en souvient-il ?)
Raphaële Billetdoux était présente à la projection. J’étais allé la voir à la fin, pour lui demander ce qu’était devenu Pénélope Palmer, l’actrice qui jouait la femme enfant. Elle ne le savait pas, l’avait vue un an plus tard, comme moi, dans Malevil, de Christian de Chalonges, et puis c’était tout, plus de nouvelles. Lorsque l’on fait quelques recherches sur google, on apprend qu’elle est la fille d’un réalisateur et d’une actrice, et qu’elle fut filmée par Andy Warhol lorsqu’elle était bébé.
On peut même la voir adulte, répondant à une interview bizarre à propos justement des films d’Andy Warhol.
 
 
 
Tout ça n’a aucune importance.
 
Maintenant, le DVD est là, sur mon bureau. Un peu inquiet de revoir un film qui m’avait tant ému, vingt-huit ans plus tard. (p... vingt-huit ans !)
 
Sur la jaquette du DVD, on a cru bon de rajouter sous le visage de l’actrice, “un film à la fois fragile et d’une force inouïe”. Ridicule. On dirait une de mes critiques.
 
Je ne sais pas ce qu’est devenue l’affiche que j’avais eu longtemps sur les murs de ma chambre. Je ne sais même plus si j’avais acheté cette affiche, ou bien si je l’avais récupérée dans le cinéma. Je ne sais plus.
 
Je vais encore un peu laisser le DVD sur mon bureau, quelques jours.