Voici donc notre petit Woody Allen
annuel. Profitons-en, tant qu’il est encore en vie…
Ce cru 2010 n’est pas le plus mauvais, mais il reste encore
largement inférieur à la dernière grande cuvée,
celle de Match Point (et oui, il faut remonter loin…).
Il y avait de quoi saliver, avec un casting alléchant, allant
de l’ex-Hannibal Lecter (Anthony Hopkins himself) à la
plus que délicieuse Latika de "Slumdog millionaire"
(Freida Pinto), en passant par le toujours très beau Antonio
Banderas et la vibrante Naomi Watts. Ils sont d’ailleurs tous
très bien, se coulant avec élégance dans le moule
Woody-Allenien.
L’histoire, bien que pas très novatrice, avait l’intérêt
de se multiplier par deux, avec deux couples en rupture faisant quelques
ravages sentimentaux autour d’eux. On allait pouvoir se délecter
en comparaisons, parallèles et autres contrastes entre les
deux récits, se croisant bien sûr mais évoluant
tout de même dans deux strates différentes de la pyramide
des âges.
Et puis, on allait peut-être retrouver la grâce londonienne
de "Match Point", le récit étant exclusivement
situé dans la capitale anglaise.
Mais les espoirs sont de courte durée, car si l’histoire
a des côtés sombres, amers et gentiment misanthropes,
l’ambiance générale reste dans un ton léger,
presque badin, pas en accord avec les possibilités crépusculaires
du scénario. Comme pour se rattraper de n’être
pas plus mélancolique, le scénariste-réalisateur
se permet sur la fin de laisser en plan plus de la moitié des
personnages et de nous dire, "non, ce n’est pas fini, à
vous spectateurs d’imaginer un épilogue…"
Le carton ou la voix off n’y sont pas, mais c’est tout
comme. Du coup, avec cette absence de morale (et pourtant on les aime
bien, les morales assassines des films de Woody Allen), tous les clichés
sur les couples restent en suspens, légèrement fissurés
par l’évolution de l’histoire mais encore très
solides, et ça n’est pas pour voir une comédie
romantique même pas terminée qu’on vient s’entasser
dans les salles de cinéma pour finalement être déçus
de ne pas avoir croisé, même en rêve, ce bel et
sombre inconnu…