La douceur et la délicatesse 
              nimbent fort joliment cette comédie amère, menée 
              sur un faux rythme, sans évènements marquants (ou 
              presque). On pourrait parfois se croire dans une histoire écrite 
              par Rohmer, la morale finale en moins, et infiniment mieux jouée. 
              La situation de départ est à la fois improbable et 
              théorique, les deux frères médecins qui consultent 
              ensemble n'ont probablement pas d'équivalent dans la réalité 
              et leur duo, parfois duel, parfois fusionnel, installe de façon 
              un peu trop évidente toutes les conséquences à 
              venir, en particulier les élans amoureux et la façon 
              dont ils s'opposent et se brisent… mais cette paire de docteurs 
              est aussi une belle trouvaille de la part d'Axelle Ropert, elle 
              fait merveille dans quelques délectables petites scènes 
              de consultation où le grand costaud à la voix grave 
              "comme du béton" (Cédric Kahn) contraste 
              élégamment avec le petit timide mais beaucoup plus 
              tendre (Laurent Stocker).
              Le quartier de Paris qui accueille le récit apporte une touche 
              inédite. Le onzième arrondissement dans "Chacun 
              cherche son chat" était très cinématographique, 
              il n'était pas évident que le quartier chinois du 
              treizième arrondissement le soit autant. En plus de l'architecture 
              verticale, les habitants croisés pas les deux médecins 
              donnent une proximité réjouissante à l'ensemble 
              du film.
              Et puis, au cœur de tout cela, il y a Judith, incarnée 
              par Louise Bourgoin. Ici, elle ne joue pas de sa fantaisie ou de 
              sa plastique. On est loin de "la 
              fille de Monaco" ou d' "Adèle 
              Blanc-Sec". Elle est une véritable actrice, montrant 
              une douceur amère d'un charme absolu. La réalisatrice, 
              qui ne cherche pas la belle image ou le cadrage hallucinant, est 
              parvenue à la saisir sous une lumière en clair-obscur 
              et l'éclairer comme une beauté fragile. Elle crée 
              l'émotion, elle est l'âme du film, à son image, 
              douce et lumineuse.